France – 24/02/2022 – energiesdelamer.eu. L’étude socio-économique menée par Plan Bleu suite à la décision adoptée en décembre dernier de faire de la Méditerranée la première zone à basse émission de soufre montre qu’au-delà de l’impact environnemental, les gains seront très supérieurs aux coûts engendrés pour adapter la flotte.

 

« On n’a pas suffisamment parlé du régime des mers régionales lors du One Ocean Summit », regrette Guillaume Sainteny, président du Plan Bleu, lors du premier rendez-vous d’un cycle organisé par Ce centre d’expertise sur les sujets développement durable et environnement en Méditerranée. Pourtant, cette forme de gouvernance est apparue dès la naissance du PNUE qui a suivi la conférence de Stockholm en 1972, l’une des premières dédiées à l’environnement.

Après la Méditerranée, régie par la Convention de Barcelone depuis 1976, une vingtaine de mers dans le monde sont couvertes par une telle gouvernance.

Assortie de sept protocoles, la Convention de Barcelone a la même valeur juridique qu’un traité international et s’impose aux lois nationales. Six de ses sept protocoles ayant été ratifiés par l’UE, ils ont le même poids que les textes européens. Ce qui a notamment valu à la France d’être condamnée en 2004 pour ne pas avoir adopté des mesures appropriées pour lutter contre la pollution massive et prolongée de l’étang de Berre.

 

Un trafic maritime particulièrement dense

Le poids du transport maritime, émetteur important de gaz à effet de serre et surtout de pollution à l’oxyde de soufre et aux particules fines, est particulièrement important en Méditerranée. En effet, alors qu’elle ne présente que 1% de la surface des mers, le trafic maritime y est particulièrement dense, notamment du fait de sa géographie, bordée par le canal de Suez et le détroit de Gibraltar. Elle accueille ainsi chaque année 20 % des transports maritimes de commerce, 10 % du trafic mondial de conteneurs et plus de 200 millions de passagers. Les effets sanitaires du fuel lourd, émanations de soufre et émissions de particules fines qui peuvent se faire sentir jusqu’à 200 km à l’intérieur des terres, sont avérés. Ils seraient responsables de nombreux décès prématurés, crises d’asthme et arrêts de travail.

Mais ce n’est pas tout. Entre autres conséquences de la combustion de ce fuel lourd : des brumes peu compatibles avec le tourisme et susceptibles de provoquer des accidents dus à une mauvaise visibilité ; une atteinte à la biodiversité marine et terrestre ; des dommages au patrimoine immobilier, bâtiments historiques ou constructions plus récentes ; sans compter les pertes économiques pour les cultivateurs et sylviculteurs engendrées par la pollution.

 

Unanimité parmi les 21 pays riverains et l’UE

Autant dire que la décision de faire de la Méditerranée une zone de contrôle des émissions (ECA) de SOX, ou ECA SOX Med, adoptée en décembre dernier par les 21 pays du pourtour méditerranéen et l’Union Européenne, lors de la vingt-deuxième conférence des parties à la Convention de Barcelone, est susceptible de changer radicalement la donne. Alors que dans le cadre de la convention MARPOL (pour la prévention de la pollution par les navires) l’OMI s’est engagée à abaisser la teneur des carburants en SOx de 3,5 à 0,5% depuis le 1er janvier 2020, ce taux test encore divisé par cinq (à 0,1%) dans les zones ECA. Outre la diminution drastique des émissions, l’accord adopté à Antalya se distingue par la rapidité de son entrée en vigueur, puisque celle-ci est prévue au 1er janvier 2025.

« Cet accord obtenu auprès de tous les pays riverains de la Méditerranée malgré un contexte géopolitique complexe est réconfortant », a reconnu Guillaume Sainteny, qui s’est également félicité qu’il soit cité parmi les 13 engagements du One Ocean Summit.

 

Des gains cinq fois plus élevés que les surcoûts

A la clé, une baisse de 79% des émissions de SOx et de 24% des particules fines. Pour s’y conformer, les armateurs ont le choix entre s’équiper d’épurateurs (en circuit fermé, ouvert ou hybrides), d’opter pour des carburants rendus plus propres grâce à des mélanges ou des additifs, ou de passer au GNL ou aux biocarburants. La première solution, moins onéreuse (chiffrée à 1,2 milliards d’euros par an par le Plan Bleu dans le cadre d’une étude socio-économique) est également moins satisfaisante car les rejets des eaux de lavage sont potentiellement très polluées. D’après cette même étude, le coût global d’un changement de carburants s’élève à 1,8 Mds€/an. Mais l’analyse coûts/avantages révèle que pour le seul volet santé, les bénéfices atteignent entre 8 et 14 Mds€, et 1100 décès évités chaque année. Soit au moins 5 fois plus que le surcoût envisagé. Sans compter les économies générées par l’absence de brumes (synonymes de moins d’incidents et d’une meilleure attractivité touristique), de moindres coûts d’entretien du patrimoine bâti, de meilleurs rendements des cultures et d’une meilleure préservation de la biodiversité marine et terrestre, qui n’ont pu être chiffrés.

L’étude a également calculé le surcoût pour le fret (+1,31/tonne pour une traversée de Gibraltar au canal de Suez) et pour le transport de passager (de +0,8 à +2,1€/billet). L’impact sur la demande en produits transportés par bateau serait inférieur à 0,1% dans 9 cas sur 10.

L’OMI devrait adopter cet accord lors de ses prochaines sessions dédiées à la protection de l’environnement en juin et décembre 2022. Restera ensuite à le faire respecter.

POINTS DE REPÈRE

17/12/2021 – Un résultat décisif de la COP22. A partir du 1er janvier 2025, les navires traversant la Méditerranée ne seront autorisés à utiliser que des carburants à faible teneur en soufre dans l’objectif d’améliorer la qualité de l’eau et de l’air de cette zone maritime. C’est une entente importante entre les pays du bassin qui se sont entendus lors de la COP22 pour créer une zone de contrôle des émissions d’oxydes de soufre (SECA) pour la Méditerranée.

07/12/2021 –  La protection environnementale pour tous, ou comment suppléer les aires marines protégées pour rendre la cible des 30% réaliste ?

Tribune d’Yves Henocque – LittOcean et membre du Bureau de Plan Bleu.

Des informations sur la COP22 sont accessibles sur le site de l’ONG Plan Bleu pour l’environnement et le développement en Méditerranée. « Plan Bleu » dirigée par François Guerquin et présidée par Guillaume Sainteny, avait participé  avec « WestMed » à l’espace « Recherche » lors d’euromaritime  en 2020.

 

 

 

 


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