France – 28/01/2022 – energiesdelamer.eu. Une table-ronde organisée par la Délégation sénatoriale aux outre-mer sur les câbles sous-marins. Les parlementaires, se penchent sur leur rôle dans la stratégie maritime nationale, un sujet sur lequel la Délégation sénatoriale aux outre-mer publiera un rapport le 24 février prochain. Des assises des Outre-mer organisées en décembre dernier par Ouest-France à l’événement «L’outre-mer aux avant-postes », sous l’égide du magazine « Le Point » du 25 janvier, les territoires ultra-marins sont dans l’air du temps. Et pas seulement dans les media.

Dans ce cadre, les sénateurs, qui mènent par ailleurs une mission d’information sur « L’exploration, la protection et l’exploitation des fonds marins », ont consacré une table-ronde à un thème lui aussi d’actualité : les câbles-sous-marins. Non seulement parce que la récente déconnexion des îles Tonga de l’Internet mondial a souligné la vulnérabilité des territoires insulaires aux événements climatiques extrêmes. Mais aussi parce qu’ils jouent un rôle crucial dans les communications et l’économie mondiale puisqu’ils transportent 99% des données échangées par quelque cinq milliards d’internautes. Un chiffre qui, à la faveur de la crise sanitaire, a été atteint avec un an d’avance sur les prévisions les plus récentes. Lesquelles tablaient déjà sur un triplement du trafic en cinq ans.

Une politisation du sujet qui accroît la vulnérabilité

Les GAFAM ont aujourd’hui les capacités financières et techniques de faire construire leurs propres câbles. Le câble Dunant, qui relie la France aux États-Unis, appartient à Google, et le câble Peace entre la Chine à Marseille, aux géants chinois du secteur. Facebook est membre d’au moins six consortium et Google détient des intérêts dans au moins 13 câbles depuis 2010.

« Ajoutés à cela, les risques de captation des données révélés par Snowden en 2013 ont rendu le sujet éminemment politique », constate Camille Morel, chercheuse en relations internationales à l’Université Jean Moulin Lyon 3. Un sujet débattu aussi bien dans des instances régionales ou nationales, qu’à l’ONU – sous l’angle environnemental et du partage des activités maritimes -, à l’OTAN – en termes de défense – ou à la Commission européenne – en termes de souveraineté.

A la clé : une surface médiatique accrue, mais aussi une plus grande visibilité. Et donc, une plus grande vulnérabilité, qu’il s’agisse de l’intégrité physique des contenants, les câbles eux-mêmes, que de celles des contenus, autrement dit, les données transportées.

Face à ces menaces, et à la difficulté de les protéger physiquement les câbles, la redondance liée à la quantité et, surtout, à la capacité des câbles déployés, constitue la meilleure défense. Un principe qui vaut notamment pour les outre-mer.

La souveraineté française en perte de vitesse

Avec l’essentiel du trafic mondial qui transite par l’Amérique du Nord, la suprématie américaine est écrasante. « 80% du trafic émis par les internautes français est à destination des Etats-Unis, précise Jean-Luc Vuillemin, vice-président exécutif d’Orange Marine. Et c’est la même chose qu’il s’agisse de la Métropole ou des outre-mer. » Si la France a d’ores et déjà perdu de sa souveraineté, comme le reconnaît Stéphane Lelux, président de Tactis et du Comité stratégique de filière « Infrastructures du numérique », elle a néanmoins une carte à jouer dans le développement de routes directes entre l’Europe et l’Afrique ou le Pacifique.

Aux Etats-Unis, le sujet est hébergé au sein d’une équipe dédiée, la « team telecom ». En France, sa gouvernance se partage entre le SGDSN (secrétariat général de la Défense et de la Sécurité nationale) et le Ministère de la Mer.

Cette croissance exponentielle du trafic génère une concurrence accrue entre façades maritimes pour accueillir des points d’atterrissage. Pour Alain Biston, président du leader mondial Alcatel Submarine Network (ASM), avec des délais d’obtention de permis de deux à trois ans, la France n’est pas la mieux placée. D’autant plus, ajoute Jean-Luc Vuillemin, qu’il existe des pavillons européens de 30 à 40% moins chers que les nôtres, et que certains Etats octroient des subventions pour cela, là où la France exige une redevance. Le Royaume-Uni possède d’ailleurs environ deux fois plus de câbles et deux fois plus de data-centers que nous.

En termes de protection, comme le souligne Philippe Folliot, sénateur du Tarn et l’un des rapporteurs du rapport, difficile de protéger quelque 6000 km de câbles avec une quinzaine de navires seulement. Des navires câbliers d’ailleurs vieillissants, avec un âge moyen supérieur à 30 ans (Ndrl à l’exception de ceux de Nexans)

Des câbles au service de l’environnement

Outre le transport de données, des câbles intelligents, équipés de capteurs, pourraient permettre de transmettre des informations (température, pression, etc.) sur des abysses situés à des profondeurs de 8000 km dont on ne sait encore presque rien, et qui pourraient s’avérer précieuses pour documenter le changement climatique. Un sujet sur lequel ASN planche avec l’Ifremer, et qui concerne tout particulièrement les outre-mer.

Ces derniers y sont en effet particulièrement vulnérables : hausse du niveau de la mer, recul du trait de côte, risques d’événements extrêmes, salinisation des sols, cyclones… En retard sur certains volets de la transition, par exemple la persistance de centrales électriques à fioul lourd, les territoires ultra-marins offrent par ailleurs des terrains de jeu parfaits pour certaines technologies (énergie thermique des mers, climatisation par eau marine profonde ou swac…)

POINTS DE REPÈRE

24/09/2021 – Partie 1 – Spécial reportage à Halden. Le navire câblier Nexans Aurora construit par Ulstein Verft AS, est prêt pour la pose du câble destiné à relier le réseau électrique de la Grèce continentale à la Crète.

23/09/2021 – Partie 2. Nexans a investi plus de €500 millions pour répondre aux besoins de l’éolien offshore et étend continuellement ses opérations dans ce secteur à travers le monde. Le Groupe dispose déjà du navire « Nexans Skagerrak » spécialement conçu pour la pose de câbles.

 

Visite du nouveau câblier Nexans Aurora inauguré à Halden en Norvège – 2

Jeudi 9 décembre 2021 – Délégation sénatoriale aux outre-mer : Auditions dans le cadre de l’étude sur la place des outre-mer dans la stratégie maritime nationale. Grands fonds marins


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