Monde – 21/08/2025 – energiesdelamer.eu.

Après un échec à Busan (Corée du Sud), fin 2024, les négociateurs de 185 pays ont mené d’intenses discussions à Genève (Suisse) pour tenter de forger le premier traité international de lutte contre la pollution plastique.

Le cinquième et dernier round de négociations pour un traité mondial contre la pollution plastique, à Genève, en Suisse, a encore échoué vendredi 15 août, les intérêts industriels du parapétrolier, semblant trop éloignés des objectifs de réduction.

D’après des chiffres de l’Unep, mentionnés par Sorbonne Université, seule une infime quantité de plastique, moins de 10 %, a été recyclée sur les quelque neuf milliards de tonnes produites dans le monde jusqu’à 2024. Résultat : environ 200 millions de tonnes de plastiques se déversent dans les océans, alimentés par les cours d’eau, et forment un nouvel écosystème dénommé la « plastisphère ». En l’absence de mesures efficaces, l’Unep estime que les rejets de déchets plastiques dans les milieux aquatiques pourraient tripler d’ici à 2040.

En attendant une solution politique, il convient de se tourner une nouvelle fois vers la recherche pour trouver un peu d’optimiste …

Des chercheurs de Georgia Tech ont créé un matériau inspiré des coquillages pour aider à améliorer le processus de recyclage des plastiques et rendre le matériau résultant plus fiable.

Les structures qu’ils ont créées ont considérablement réduit la variabilité des propriétés mécaniques généralement observées dans le plastique recyclé. Leur produit a également conservé les performances des matériaux plastiques d’origine. Les chercheurs affirment que leur conception bio-inspirée pourrait contribuer à réduire les coûts de fabrication des matériaux d’emballage vierges de près de 50 % et offrir des économies potentielles de plusieurs centaines de millions de dollars. De plus, comme moins de 10 % des 350 millions de tonnes de plastique produites chaque année sont effectivement recyclées, l’approche de Georgia Tech pourrait permettre d’éviter l’enfouissement de davantage de plastique. Le professeur adjoint en génie aérospatial Christos Athanasiou a dirigé l’étude, qui a été publiée dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS) .

Pourquoi les plastiques sont-ils si peu recyclés ? Et lorsqu’ils le sont, pourquoi ne peuvent-ils pas être largement réutilisés ?

Les plastiques recyclés ne sont pas des matériaux vierges, mais un mélange chaotique de vies passées. Chaque bouteille, sac et emballage porte en lui son histoire d’additifs, de stress et de dégradation. Lorsqu’on les recycle mécaniquement en les faisant fondre, on obtient un matériau plus fragile que le plastique vierge, et terriblement imprévisible. L’imprévisibilité est un facteur décisif. C’est pourquoi les plastiques recyclés sont rarement réutilisés dans des produits nécessitant résistance, sécurité ou consistance, comme les matériaux de construction, les composants automobiles ou les véhicules de livraison autonomes. On ne peut tout simplement pas leur faire confiance pour leurs performances.

Pourquoi la structure des coquillages peut-elle offrir des pistes d’amélioration ?

La nature ne purifie pas. Elle organise. Les coquillages, comme la nacre, sont constitués de minéraux fragiles liés entre eux par des protéines souples. Ils ne sont pas parfaits, mais robustes. Le secret réside dans leur architecture : des « briques » dures reliées par un « mortier » souple, créant un système qui dissipe l’énergie et contrôle les défaillances. Il s’agit d’une philosophie de conception fondamentalement différente de celle que nous utilisons habituellement pour concevoir des matériaux, où l’uniformité et la pureté sont les clés de la fiabilité. La nature accepte la variabilité et la rend gérable grâce à sa structure. Nous avons emprunté cette idée.

Qu’avez-vous créé et comment l’avez-vous testé ?

Nous avons récupéré des feuilles de polyéthylène haute densité (PEHD) recyclé – le même plastique que celui utilisé dans les films étirables industriels – et les avons réassemblées pour former des composites stratifiés inspirés des coquillages. Imaginez une structure en nacre synthétique : des « briques » de plastique rigide assemblées par un « mortier » plus souple fabriqué à partir d’un polymère adhésif commercial, conçu pour absorber les contraintes et limiter les ruptures. Pour tester ce système, nous avons démonté ces structures bio-inspirées à l’aide d’un dispositif mécanique sur mesure. Nous avons enregistré leur comportement en temps réel, de la déformation initiale à la rupture finale, en passant par l’amorçage de la fissure et sa propagation.

Nous avons ensuite développé un nouveau modèle : un modèle de chaîne de cisaillement en tension, unique en son genre, sensible aux incertitudes. Plutôt que d’évaluer simplement la rigidité et la résistance du matériau, notre modèle a également fourni une mesure fiable de sa performance sous tension.

Quels ont été les résultats ?

Nous avons réduit la variabilité de l’allongement maximal – une mesure clé des performances mécaniques – de plus de 68 %. Normalement, les plastiques recyclés présentent des performances mécaniques variables. Nos composites structurés étaient constants. C’est une exigence essentielle pour toute application concrète. En d’autres termes : nous avons construit une structure à laquelle vous pouvez faire confiance, en utilisant des matériaux que vous ne pouvez normalement pas utiliser. Le film étirable PEHD est un matériau transparent qui enveloppe les produits empilés sur des palettes. Une fois recyclé, il ne peut plus remplir la même fonction. Pas tout à fait. Le film étirable doit être à la fois résistant et flexible. Mais une fois exposé au soleil, aux contraintes et à la chaleur, sa structure moléculaire change. Le recycler à l’aveugle, c’est comme réutiliser un parachute sans vérifier s’il est déchiré. Notre conception bio-inspirée ne se contente pas de réutiliser le plastique : elle restaure sa fiabilité, permettant ainsi une réutilisation haute performance.

Vous êtes à l’École de génie aérospatial. Ce travail ne semble pas lié aux avions, aux fusées ou à l’espace. Quel est le lien ?

Concevoir la prochaine génération de systèmes aérospatiaux exige une réflexion transversale et une innovation au-delà des matériaux conventionnels. Par exemple, l’un des plus grands défis de l’ingénierie spatiale est de créer des structures résistantes aux environnements imprévisibles et extrêmes. Qu’il s’agisse d’une pièce de fusée réutilisable ou d’un abri sur Mars, nous avons besoin de matériaux résilients tout au long de leur cycle de vie. Notre étude PNAS s’attaque à un problème fondamental de mécanique : comment construire des structures fiables à partir de matériaux peu fiables ? Ce n’est pas seulement une question de recyclage. C’est une question d’avenir pour l’espace.

Quelle est la prochaine étape ?

Nous développons cette approche pour travailler avec une plus large gamme de plastiques recyclés, tout en les associant à des adhésifs biosourcés plus écologiques afin de rendre l’ensemble de la structure plus durable. Parallèlement, nous étudions comment cette stratégie pourrait soutenir la construction extra-terrestre, où le recyclage et la réutilisation des matériaux sont indispensables. Le Lunar Recycling Challenge de la NASA, par exemple, préfigure un avenir où les déchets deviendront la pierre angulaire de la survie.

 

La production mondiale de plastique a connu une croissance exponentielle, passant de 2,3 millions de tonnes en 1950 à 162 millions en 1993 puis 448 millions en 2015.

La production mondiale de plastique a doublé entre 2000 et 2020 pour atteindre 460 millions de tonnes par an et devrait atteindre le milliard de tonnes à l’horizon 2050 si rien n’est fait. A cette échéance, les émissions de gaz à effet de serre associées à la production, à l’utilisation et à l’élimination des plastiques devraient représenter 15% des émissions mondiales.

La cinquième et dernière session des négociations de l’Assemblée des Nations Unies pour aboutir à l’adoption d’un traité pour mettre fin à la pollution plastique a eu lieu du 25 novembre au 1er décembre 2024, à Busan en Corée du Sud. La ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, est « déçue et c’est dit en colère ». Ce sommet a exacerbé les tensions entre les 185 pays réunis à Genève qui ne sont pas parvenus à se mettre d’accord. Présenté au milieu de la nuit de jeudi à vendredi, le nouveau texte de compromis comportait encore plus d’une centaine de points à clarifier, après dix jours d’intenses négociations.

« Nous n’aurons pas de traité sur la pollution plastique ici à Genève », a résumé le représentant de la Norvège au cours d’une séance plénière au lever du jour.

POINTS DE REPÈRE

Article mentionné dans NEWSWISE

Suppression de la variabilité des propriétés mécaniques des plastiques recyclés grâce à une conception bio-inspirée. Actes de l’Académie nationale des sciences (vol. 122, 2025).

 

France : Lutte contre la pollution plastique

 

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