France – 25/11/2025 – energiesdelamer.eu. Partie 1.
La relance de l’appel d’offre AO7 est potentiellement possible, et, selon le discours du Président de la République souhaitable. Mais comment concilier pour le projet d’Oléron environnement, économie, emplois et souveraineté après les débats publics sur « Oléron 1 » et « la mer en débat » au sein de la façade Sud Atlantique ?
» La portée juridique des débats publics n’a jamais été simple à déterminer ; ils sont à la frontière du droit et de la sociologie de l’action publique » Laurent Bordereaux, Professeur des universités, Droit du littoral, environnement-aménagement-urbanisme Co-responsable du Master de Droit public Laboratoire Eole – La Rochelle Université.
Le 24 septembre 2025, le Gouvernement a déclaré l’appel d’offres relatif au parc situé en Sud-Atlantique au large de l’île d’Oléron (AO7) infructueux, celui-ci n’ayant fait l’objet d’aucune offre au terme de la période de candidature l’appel d’offres. Pourtant, le 16 février 2023, neuf candidats avaient été sélectionnés par la CRE pour répondre à l’appel d’offres.
Alain Rousset, Président de la Région Nouvelle-Aquitaine a interpellé le président de la République avant les Assises de la mer qui se sont tenues à La Rochelle afin de connaître qu’elle était la décision de l’Etat en ce qui concerne l’AO7. Le président de la République, Emmanuel Macron, a apporté le 4 novembre, une réponse » timide » mentionne Laurent Bordereaux, juriste, professeur à La Rochelle Université dans sa tribune publiée par notre confrère Le marin.
La question reste entière ainsi que les conditions qui permettront de relancer l’AO7, si cela est possible.
C’est la raison pour laquelle, à partir de la tribune, parue le 19 novembre dernier, energiesdelamer.eu a souhaité aller plus loin avec Laurent Bordereaux.
1 – Comment est-il possible de concilier, environnement, économie, souveraineté ? quelles sont vos recommandations ?
Laurent Bordereaux – Le sujet est vaste et dépasse les cadres d’analyse d’une discipline. Qui pourrait prétendre détenir la vérité ? La question se pose d’abord en termes de vision politique. Sur les grandes thématiques structurantes du XXIème siècle, comme la protection de la biodiversité, l’énergie ou les risques naturels côtiers (l’érosion notamment), un cap politique clair est indispensable, ce qui fait défaut aujourd’hui. Quels que soient les modes de production d’énergie pour demain, il faut une stratégie décidée démocratiquement sur la base d’expertises scientifiques. Mais au final, il appartient à l’Etat de fixer une trajectoire claire et durable ; elle est plus que jamais attendue. Sur l’environnement, la cohérence veut que des espaces reconnus pour leur richesse écologique soient préservés d’une anthropisation toujours croissante. En la matière, on ne saurait se contenter de » micro-zones » de protection forte. Les sites Natura 2000 et les parcs naturels marins doivent être respectés dans leur vocation. La Charte de l’environnement affirme que » la préservation de l’environnement doit être recherchée au même titre que les autres intérêts fondamentaux de la Nation « . Dans ce cadre complexe, la conciliation n’est pas toujours possible et il faut établir des priorités. C’est là tout l’enjeu de la planification maritime qui, sur le plan opérationnel, relève des documents stratégiques de façade (DSF). Ces derniers doivent s’inscrire dans la durée sans être figés dans le temps.
2 – Est-ce que le débat public de 2021-2022 peut être remis en cause ?
Laurent Bordereaux : Dans ses grandes lignes on ne voit pas bien comment. Mais il faut distinguer ici le sociétal et le juridique. La portée juridique des débats publics n’a jamais été simple à déterminer ; ils sont à la frontière du droit et de la sociologie de l’action publique. Le débat public sur Oléron 1 a été long et difficile. Les critiques ont été vives, notamment sur la pêche et la question environnementale. L’un des enseignements de ce débat aura permis de souligner qu’un projet devant servir de point d’ancrage à l’éolien en mer pour une façade maritime (en l’occurrence Sud-Atlantique) élaboré au cœur d’un parc naturel marin et de deux zones de protection reconnues au titre de Natura 2000 avait toutes les chances d’échouer. L’éloignement du projet éolien des côtes fut une conséquence directe du débat public, en dehors du périmètre du parc naturel marin de l’estuaire de la Gironde et des pertuis charentais. Sa localisation en zone Natura 2000 de protection des oiseaux demeure un point de contestation. En tous cas, quelles que soient les sensibilités et les approches, on imagine très mal, aujourd’hui, revenir devant le public en plaidant pour un rapprochement des côtes, ce qui serait perçu comme un retour à la case départ en contradiction avec les enseignements du débat sur Oléron 1. D’autant plus qu’en façade Sud-Atlantique, le débat public national sur la mer de 2024 (la » mer en débat « ) a débouché sur l’identification de zones propices à l’éolien offshore encore plus éloignées des côtes, en dehors des aires marines protégées (parc naturel marin et zones Natura 2000). Ce courant tirera peut-être la relance potentielle d’Oléron 1 vers le large, dès lors qu’il y a possibilité de s’amarrer à un modèle technologique et économique tenable. Pour l’heure, on a un peu le sentiment que la discussion sur la relance d’Oléron 1 flotte entre deux débats publics. C’est aussi le problème des projets qui s’étalent sur un temps aussi long...
Le contexte
Lors de l’annonce par le Gouvernement de l’appel d’offre AO7 d’Oléron, la CRE, en étroite collaboration avec les services de l’Etat, a souhaité approfondir les raisons qui ont conduit plusieurs candidats potentiels à ne pas déposer d’offre. Celles-ci ont été publiés le 24 septembre également
Les retours de la filière conduisent à identifier plusieurs facteurs. Certains sont communs aux deux appels d’offres (AO7 Oléron et AO8 Centre Manche 2*) comme la hausse récente des coûts de la filière et, plus généralement, une économie des projets éoliens en mer en évolution ou encore les dispositions du cahier des charges en matière de raccordement qui ont fortement contraint le choix des aérogénérateurs. S’agissant plus précisément de l’AO7, les conditions de site propres à la zone d’Oléron rendent structurellement ce projet plus risqué, et donc plus coûteux.
Globalement, le contexte incertain sur le plan industriel et technologique ainsi que les risques identifiés sur l’évolution des coûts des projets plaident pour une évolution des procédures.
Les objectifs et les retombées attendues pour la Nouvelle-Aquitaine
En 2024, la France a affiché une volonté d’accélérer le développement de l’éolien en mer avec l’objectif d’implanter une cinquantaine de parcs éoliens en mer d’ici 2050 afin d’arriver à une puissance cumulée de 45 GW (gigawatts). Cela pourrait contribuer à environ 20 % de l’électricité qui sera produite en France.
La Nouvelle-Aquitaine doit y prendre une part importante, avec une capacité installée d’au moins 7 GW prévue en 2050. Les conditions des premiers appels d’offre (AO) pour la construction des parcs étaient les suivants pour Oléron 1 (AO7) : une puissance de 1 à 1,2 GW en éolien posé à grande profondeur, à plus de 39 km des côtes avec une prévision de mise en service en 2032 et un raccordement par RTE au niveau de la Charente-Maritime et des Deux-Sèvres.
Oléron 2 (intégré dans l’AO9, puis retiré) : une puissance de 1 à 1,2 GW en éolien posé ou flottant, à plus de 40 km des côtes, avec une prévision de mise en service en 2034 et un raccordement par RTE sur la liaison de renforcement électrique en mer entre la Gironde-Loire-Atlantique (GILA).
Les lauréats des parcs Oléron 1 et Oléron 2 devaient être connus mi-2025 pour le premier et début 2026 pour le second.
Pour l’AO10 dans le Golfe de Gascogne Sud, il était prévu une puissance de 1,2 GW en éolien flottant, avec une prévision de mise en service en 2035 avec un raccordement par RTE par la liaison » Gila « ).
L’étude Innosea 2025 sur l’impact socio-économique de l’éolien en mer en Nouvelle-Aquitaine, portée par le Grand Port Maritime de La Rochelle, présente les résultats suivants (périmètre : AO7, AO9 et AO10) :
2.2 milliards d’euros de valeur ajoutée captée en région sur 15 ans et 20 % des dépenses totales captées en région ;
Prévision d’emplois annuel moyen : plus de 1 700 postes à temps plein entre 2025 et 2040 ;
165 entreprises régionales identifiées sur l’ensemble de la chaine de valeur de l’éolien…
La réponse du Président de la République le 4 novembre 2025
Interpellé par Alain Rousset, président de la Région Nouvelle-Aquitaine avant les Assises de l’économie de la mer, le Président de la République Emmanuel Macron, alors que le Gouvernement est toujours dans l’attente d’une programmation annuelle de l’énergie (et d’un budget pour 2026), a assuré sa volonté de « remettre le sujet sur la table ». » J’ai demandé au gouvernement de retravailler sur ce sujet, a-t-il annoncé. Le gouvernement travaille pour que le projet revienne sur la table et il faut que la façade sud atlantique soit un des acteurs. Nous ne devons pas lâcher nos ambitions énergétiques. «
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