France – 21/06/2021 – energiesdelamer.eu. « L’accord obtenu est en-deçà de nos attentes » déclare Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué aux Transports. Du 10 au 17 juin, le Comité de protection du milieu marin devait arrêter la méthode pour se conformer avant 2030 aux premières exigences dans le cadre de la décarbonation du transport maritime. Une nouvelle proposition qui ne réduirait l’intensité carbone des navires que de 11 % d’ici 2026, a été proposée à la table des discussions de la session préparatoire clôturée le 28 mai, et elle l’a emporté.

Ainsi que le mentionnait le Journal de la Marine marchande le 1er juin dernier, « à l’OMI, un compromis qui paraît gravé dans le marbre n’est jamais définitivement scellé. Les demi-succès sont des demi-échecs et inversement. Les accords et désaccords composent une musique qui ne fait jamais dissonance. La réunion préparatoire au MEPC 76, qui s’est tenue du 24 au 28 mai, en a apporté une nouvelle illustration alors que la précédente (en octobre dernier en amont du MEPC 75), avait permis de figer quelques mesures sur lesquelles on revient aujourd’hui. C’est au sein de ces sessions techniques (et pas vraiment dans celle du MEPC qui valide et adopte un projet de texte largement discuté en amont) que sont formulées et débattues les propositions soumises par les États membres ».

Que s’est-il passé du 10 au 17 juin 2021 ?

Selon le communiqué commun publié le 18/06/2021 des ministères de Barbara Pompili, Annick Girardin et Jean-Baptiste Djebbari, le 76ème Comité de la protection du milieu marin (MEPC), l’Organisation Maritime Internationale (OMI) a adopté définitivement les premières mesures concrètes visant à mettre en œuvre sa stratégie de réduction de l’intensité carbone des navires d’ici 2030, bien peu satisfaisantes.

« Ces mesures se décomposent en deux parties :

  • Un volet « technique » : les navires devront mettre en place durant l’année 2023 au plus tard de nouveaux équipements, comme des limiteurs de puissance, afin de réduire immédiatement leur intensité carbone ;
  • Un volet « opérationnel » : une notation individuelle de l’intensité carbone réelle (consommation du navire / distance parcourue) sera attribuée aux navires (note de A à E) chaque année sur la base de leurs performances de l’année précédente, en référence à des seuils qui seront abaissés d’année en année. Ces mesures conduiront à réduire la vitesse de certains navires ou encore encourager la propulsion vélique.

La France salue l’élaboration et l’adoption d’un nouveau cadre inédit à cette échelle. Celui-ci s’appliquera à la très grande majorité des navires du transport maritime international. Il apportera davantage de transparence sur les performances des navires et facilitera les prochaines étapes de la décarbonation du secteur maritime, en permettant notamment aux États, aux financeurs, aux clients ou aux ports de mettre en place sur cette base des mesures additionnelles ou des mécanismes d’incitation de type bonus-malus.

La France a joué un rôle moteur dans ces travaux, et s’est constamment battue, avec ses partenaires européens, pour en établir les paramètres les plus ambitieux afin de faire contribuer le transport maritime international à sa juste part aux objectifs de l’Accord de Paris de 2015.

Malgré ces efforts cependant, une majorité d’Etats membres de l’Organisation, dans la dernière ligne droite des négociations, se sont prononcés en faveur d’une réduction de l’intensité carbone du volet opérationnel limitée à 11% entre 2020 et 2026. Une révision de la mesure en 2025 permettra de fixer de nouvelles valeurs pour les années 2027-2030 après analyse des premières années de mise en œuvre afin d’atteindre l’objectif fixé par la Stratégie climatique de l’OMI de réduire l’intensité carbone de la flotte mondiale de 40% entre 2008 et 2030.

Parmi les autres sujets abordés, le Comité a formellement adopté une interdiction pour les navires exploités dans les eaux arctiques d’utiliser et de transporter du fioul lourd comme combustible progressivement entre 2024 et 2029 et, à la demande notamment du Canada et de la France, a inscrit à son programme de travail la question de la réduction du bruit sous-marin produit par les navires de commerce pour atténuer leurs incidences néfastes sur la faune marine ».

Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique

 « Le transport maritime international représente 2,5 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre : décarboner ce secteur est un levier important pour atteindre nos objectifs climatiques, j’y attache une importance toute particulière. Les mesures prises par l’OMI constituent une première étape, mais elles ne suffiront pas pour atteindre nos objectifs de décarbonation du secteur. La France restera mobilisée pour porter cette ambition au niveau européen et international. Je pense par exemple à l’intégration du secteur du transport maritime dans le système d’échange de quotas d’émissions européen (EU/ETS), qui fera l’objet d’un projet de texte de la Commission européenne le 14 juillet. » En effet, l’UE a demandé un transport maritime efficace, équitable et propre. Le 16 septembre 2020, le Parlement européen a voté l’inclusion du transport maritime au sein du SEQE-UE d’ici 2022 et l’établissement de normes contraignantes pour les compagnies maritimes afin de réduire leurs émissions de CO2 d’au moins 40% d’ici 2030 ICI.

Annick Girardin, ministre de la Mer

« Les mesures prises vont dans le bon sens mais ce n’est pas suffisant. La France est déçue de ce résultat car il ne comporte pas suffisamment de garanties permettant l’accomplissement des objectifs au terme de la décennie. Nous continuerons à nous battre avec force pour des objectifs plus ambitieux, comme des mesures de tarification du carbone permettant d’accélérer le développement et le déploiement de moyens de propulsion alternatifs durables au sein du secteur. Parce que ce mode de transport est appelé à se développer plus encore dans les prochaines années, la décarbonation du transport maritime fait partie des priorités du gouvernement. »

Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué aux Transports

« La France s’est fortement mobilisée pour défendre l’objectif ambitieux d’un facteur de réduction de l’intensité carbone de 22% sur le volet opérationnel jusqu’en 2030 par rapport à 2019. Si l’accord obtenu est en-deçà de nos attentes, il n’en demeure pas moins qu’il convient de saluer l’action résolue de l’OMI qui a permis d’adopter un premier cadre international pour la décarbonation du transport maritime. Cela permettra de continuer les efforts de décarbonation de la France pour le transport maritime, dans le contexte de l’action déterminée que je mène plus largement au niveau européen et international pour la décarbonation des transports, tout en veillant à limiter les risques de fuites carbone et en donnant toute sa place à l’accompagnement de la transition de nos acteurs. »

Ndlr : Selon le Parlement européen, les émissions provenant de l’aviation internationale et du transport maritime ont respectivement augmenté de près de 130% et 32% au cours des 20 dernières années. Il s’agit de la croissance la plus rapide de l’ensemble du secteur des transports, seul secteur dans lequel les émissions ont augmenté depuis 1990. En 2050, malgré les améliorations en matière de consommation de carburant, les émissions provenant des avions devraient être 7 à 10 fois supérieures aux niveaux de 1990, tandis que les émissions des navires devraient augmenter de 50 à 250%. (Mis à jour 28/04/2021 – ICI).

POINTS DE REPÈRE

26/10/2020 – Annick Girardin ministre de la mer déplore que les résultats obtenus, « ne soient pas à la hauteur des attentes de la France car il ne garantit pas l’atteinte des objectifs de l’Accord de Paris sur le climat ni de la  stratégie de l’OMI ».

Le Sommet de l’OMI rate son rendez-vous en faveur de mesures environnementales plus contraignantes pour le transport maritime

Une première étape avait été franchie par le groupe de travail de l’Organisation maritime internationale (OMI) qui s’était réuni du 19 au 23 octobre 2020, pour finaliser un paquet de mesures visant à réduire l’intensité carbone du transport maritime international de 40 % à l’horizon 2030. Cet objectif figure dans la Stratégie de l’OMI sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre adoptée en 2018.

Le ministère de la mer avait souligné que ce compromis comportait deux avancées concrètes, déterminantes pour engager la décarbonation du secteur :

  • La réduction, dès 2023, de l’empreinte CO2 de chaque navire, grâce à une certification obligatoire de son efficacité énergétique (EEXI) permettant de garantir que des mesures techniques de réduction ont été mises en place  à l’instar de la limitation de puissance des navires ;
  • La classification annuelle des navires en fonction de leurs performances réelles, sous la forme d’une note allant de A (faible intensité carbone) à E (forte intensité carbone), avec des exigences croissantes d’année en année. Un système de mesure de l’intensité carbone des navires (CII) est à la base de cette notation inédite, qui doit permettre aux États, aux financeurs et aux chargeurs de mettre en place des incitations au verdissement, par exemple de type bonus-malus

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