France – Mercredi 19/12/2018 – Interview de Jean-Louis Bal. Le président du Syndicat des énergies renouvelables (SER), continue d’être confiant dans sa capacité à infléchir la Programmation Pluriannuelle de l’Energie en faveur des énergies de la mer. C’est ce qu’il a confié à energiesdelamer.eu au cours d’un entretien avec la rédaction le mardi 11 décembre.

 

 

EDM : Etes-vous toujours confiant sur la capacité des acteurs à faire à modifier la PPE en faveur des énergies de la mer ?

 

Jean-Louis Bal. Le SER n’a pas levé « le crayon». Nous comptons sur la phase de six ou sept mois de concertation pour améliorer le modèle. Ce que le SER demande, ce sont des appels d’offres en série pour un gigawatt par an dès 2019 et jusqu’en 2024, soit 6 GW au total. Sachant que les projets qui vont sortir pour un appel d’offres en 2024 seront réalisés à partir de 2030. Malheureusement, ce n’est pas vraiment ce qui ressort des annonces faites par le Ministre sur la PPE, puisqu’avec Dunkerque, ce sont uniquement environ 3,5 GW qui sont prévus d’ici à 2024. Il en résulterait donc une puissance installée de 6,5 GW maximum au mieux en 2030.

Le lauréat de l’appel d’offres de Dunkerque devrait être connu au deuxième trimestre 2019. Il s’agit d’un type d’appel d’offres (dialogue concurrentiel, études préalables, raccordement réalisé et financé par RTE, mise en place d’autorisations à caractéristiques variables), dont on pourra à cette occasion de tester la validité.

J’aurais d’ailleurs préféré que l’on sélectionne le lauréat plus rapidement, car je pense que le prix qui va ressortir sera du même ordre que ceux enregistrés dans les récents appels d’offres dans les pays du Nord de l’Europe. Car il y a un problème de confiance dans la compétitivité de l’industrie éolienne offshore, d’où le projet de PPE tel qu’il existe.

Il est pourtant nécessaire de maintenir une filière qui émerge et qui s’affirmera uniquement s’il y a des volumes suffisants projetés à l’avenir.

A Saint-Nazaire, l’usine de GE existe et fonctionne, à Cherbourg, l’usine LM Wind Power a recruté 100 personnes en cette fin 2018 et produira dès 2019, et Siemens-Gamesa devrait potentiellement s’implanter au Havre. Mais Siemens-Gamesa a déjà indiqué que s’il n’y a pas d’amélioration, l’investissement industriel pourrait être remis en cause. Les machines seraient alors assemblées ailleurs.

Avec les six parcs prévus, ce sont déjà quelques 15 000 emplois qui vont être créés dans la filière éolienne offshore. Et au-delà, il faudra maintenir ces installations et ces emplois, en misant sur les nouveaux appels d’offre et sur l’exportation. Il faut quand même se rappeler que la première commande de l’usine de Saint-Nazaire a été expédiée aux Etats-Unis…

 

 

EDM : Voilà pour l’éolien posé, mais pour l’éolien flottant ?

 

JLB. Sur l’éolien flottant, la PPE propose deux appels d’offres de 250 MW chacun, en Méditerranée et en Bretagne. C’est manifestement insuffisant car il y a deux régions en Méditerranée capables d’accepter ces projets et une en Bretagne.

Un tel schéma organise une compétition entre les Régions. Le PPE propose ensuite un appel d’offre de 500 MW en 2023. Notre proposition est de 2 750 MW au total, avec dès le départ trois appels d’offres pour 250 MW chacun, pour répondre aux demandes de Bretagne, Occitanie et Sud-PACA.

Puis, un gigawatt tous les deux ans, au regard de la manière dont se passent les appels d’offres précédents. L’enjeu industriel est aussi important : sur les éoliennes comme pour l’éolien en mer posé, mais aussi sur le flotteur notamment, pour lequel il y a une série d’entreprises qui se sont positionnées. Qui va émerger ? Nous ne le savons pas encore. De même, il reste un enjeu à se positionner parmi les premiers sur l’ancrage et le câblage de tels instruments. D’où l’intérêt d’avancer.

 

 

 

EDM : En revanche l’hydrolien semble bien avoir été sacrifié, de même que les autres technologies…

 

JLB. L’hydrolien n’est effectivement même pas mentionné dans le dossier de presse de la PPE. Il y a pourtant une utilité en termes de développement technologique à ce que cela figure dans la PPE, notamment via des fermes pilotes, pour pouvoir, lors de la prochaine PPE, en 2023, passer aux fermes commerciales. Nous disposons pourtant de deux belles entreprises, HydroQuest et Sabella, qui avancent sur des démonstrateurs. Ainsi Akuo Energy et Sabella sont partenaires dans un projet d’autonomie énergétique pour l’île d’Ouessant, en associant différentes énergies renouvelables, dont plusieurs hydroliennes. Et HydroQuest avance sur la mise en eau de sa machine de 1 MW à Paimpol, tout en ayant installé fin octobre 2018 la première ferme hydrolienne fluviale en France sur le Rhône. Les zones non interconnectées (ZNI) sont aussi un marché, en Polynésie par exemple, où il y a sûrement une place pour de petites hydroliennes.

 

La problématique est la même sur le houlomoteur, avec encore beaucoup de chemin à faire. Enfin, bien avant l’ETM, il y a des possibilités de SWAC (Sea Water Air Conditioning) dans les ZNI. Un important projet à l’Ile de la Réunion est à nouveau à l’ordre du jour, où se trouvent de gros consommateurs de climatisation. Quand on a un MWh électrique conventionnel à 250 euros, il doit être possible d’arriver à quelque chose de plus compétitif grâce aux énergies renouvelables.

 

 

EDM – Comment voyez-vous la montée en force des Régions dans le débat autour des énergies marines ?

 

JLB. Nous sommes depuis le départ en appui des Régions, et encore plus aujourd’hui. Qu’il s’agisse de Pays-de-La Loire, Bretagne, Occitanie, Région Sud ou d’autres, elles sont investies pour la transition énergétique. Pour nous, la clé pour réussir à infléchir les orientations actuelles de la PPE, c’est l’alliance entre nous, représentants de l’industrie, et les conseils régionaux, en faveur de projets de transition énergétique, industriels et créateurs d’activités sur nos territoires. L’implication des Régions est un élément moteur pour le succès de la filière des énergies renouvelables de la mer. Nous ne désespérons pas que le gouvernement emprunte la même voie.

 

Propos recueilis par Joël Spaes

 

Points de repère

 

30/11/2018 – HydroQuest : Pourquoi les hydroliennes sont hors PPE ? Entretien avec Jean-François Simon, Président d’HydroQuest

 

27/11/2018 – Dossier de presse de la présentation de la « Stratégie française pour l’énergie et le climat » – Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) 

 

27/11/2018 – Une PPE contrariée et une ambition maritime décalée

 

17/10/2018 – e

 

13/12/2016 – Terminé plus tôt que prévu le parc éolien en mer de Block Island de Deepwater Wind (ONE) équipé de 5 turbines Haliade 150 d’une puissance totale de 30 MW devrait commencer à produire de l’électricité dans les prochains jours.

 

24/11/2016 –  chez EDF

 

 


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