SAINT-NAZAIRE (France – U.E.) – 25/01/2011- 3B Conseils – Par Francis Rousseau – Comme annoncé hier dans Le Figaro (et dans la colonne dernières nouvelles de ce blog), la divulgation tant attendue des 5 sites propices à l’implantation de l’éolien offshore en France, l’appel à projets correspondant et l’investissement de 10 milliards d’euros y affairant sont annoncés aujourd’hui à Saint-Nazaire ! L’annonce est faite par le Président de la République, Nicolas Sarkozy, en personne lors de son déplacement à Saint-Nazaire pour la signature de la construction de deux navires de guerre Mistral (cf. article Défense et Environnement). Les cinq sites retenus pour l’implantation de l’éolien offshore en France sont donc : Dieppe-le Tréport, Fécamp, Courseulles-sur-mer, tous trois formant un pôle Le Havre-Développement réunissant 40 entreprises, Saint -Brieuc fédérant les 60 entreprises de Bretagne Pole Naval et enfin Saint-Nazaire avec son pôle industriel Atlantique Neopolia de 90 entreprises. Cette liste de sites propices à l’implantation des parcs éoliens s’accompagne en effet d’un important appel d’offre visant à développer 3000 MW d’éolien offshore d’ici 2015, appel lancé auprès des industriels français et étrangers dont plusieurs se sont déjà révélés depuis longtemps. Précision : l’ appel d’offres pour la construction sera ouvert au 2e trimestre 2011 et les candidats retenus pour cette première tranche seront sélectionnés en 2012. Pour l’anecdote, Le Figaro rapportait que la Ministre de l’Ecologie, Nathalie Kosciusko-Morizet, aurait obtenu l’arbitrage du Président de la République pour conserver cette capacité de 3000 MW (sur les 6000 MW promis par Le Grenelle de l’Environnement d’ici 2020), alors que le Ministre de l’Energie, Eric Besson, aurait souhaité la limiter à 2000 MW. Politiquement c’est donc un signal plutôt globalement positif qui est donné aujourd’hui aux engagements du Grenelle de l’Environnement. Ce que certains experts déduisent de façon certaine c’est que la France ne construira pas avant longtemps plus de 6000 MW d’éolien offshore ; cela a le mérite d’éviter les spéculations de tous ordres. Est-ce un mal, est-ce un bien ? L’avenir le dira. J’ajoute que les industriels devront relever le défi de construire 3000 MW en mer entre 2012 et 2015.

Lors du tour du monde de l’éolien offshore que j’ai entamé en fin d’année dernière sur ce blog, on a pu avoir une idée des ambitions éoliennes offshore et des réalités de chacun des pays ayant accès à cette ressource. Avec 3000 MW installés d’ici 2015, grâce aux 600 éoliennes installées au large de ses côtes et 3000 autres MW d’ici 2020, la France s’inscrira dans la moyenne des pays entrant dans cette ère technologique renouvelable marine ; certains qualifient déjà ce chiffre de « piètre performance » eu égard au fait que le pays possède la seconde façade maritime mondiale. Mais il y a des esprits chagrins partout et, pour remettre les choses en perspective, je rappellerai qu’en Europe, l’éolien offshore déjà installé, produit à ce jour 1218,80 MW au Royaume-Uni, 866,48 MW au Danemark, 246,80 MW aux Pays-Bas. (chiffres EWEA 2011). Avec 0 MW produit à ce jour, le retard est donc difficile à nier pour la France, mais ce n’est rien de dire que l’éolien offshore français n’a pas eu le vent en poupe et qu’il a dû (et doit) faire face à l’opposition de nombreux lobbies hostiles à son développement.
Pour ce que l’on sait de ces 3000 MW futurs, ils auront été décidés en concertation avec les élus, les riverains, les usagers de la mer (pêcheurs et plaisanciers) et les associations environnementales. Comme exemple le plus remarquable, je citerai celui de Fécamp, où le consensus a été obtenu après une démarche de longue haleine entamée à partir de l’été 2007, grâce à une large concertation auprès des habitants, des élus locaux, des associations, des acteurs touristiques et économiques, des plaisanciers et des pêcheurs. Au terme de ce long travail mené en collaboration étroite avec l’industriel WPD Offshore, la zone propice de Fécamp a pu être définie sur une zone de moindre impact avec les acteurs de la mer. Les lecteurs de ce blog ont pu en suivre les divers épisodes tout au long de l’année dernière. Pour Patrick Jeanne, maire de Fécamp qui a déjà réagi à l’annonce présidentielle, l’appel d’offre qui suit cette annonce , va « également permettre de mobiliser les entreprises locales dans le cadre de la construction de ce parc. » Pour Estelle Grelier, Présidente de la Communauté de communes de Fécamp et Députée européenne, qui avait sollicité et obtenu l’aval de la Commission européenne d’implanter, après étude, ce type de parc au sein d’un zonage Natura 2000 :  » Ce parc marque enfin un virage dans les choix français de politique énergétique qui ne peut qu’aller dans le sens des objectifs européens de 2020. L’annonce présidentielle faite aujourd’hui devrait éclairer les conditions de réalisation économique du projet. » Il faut aussi compter dans la région de Dieppe-Fécamp avec le projet Enertrag du Parc de la Côte d’Albâtre, le plus ancien des projets offshore français qui a reçu son permis de construire en septembre 2008 et dont les travaux pourraient commencer selon le constructeur « aux beaux jours 2011 » pour poser en mer 21 éoliennes M5000 de 5MW d’une capacité de 105 MW exploitables dès 2012.
Sur l’ensemble de ces sites, les grands opérateurs européens, comme le suédois Vattenfall ou l’allemand E.ON, sont déjà sur les rangs. Du côté de la France, EDF ENR et Alstom Hydro & Wind ont annoncé avoir passé « un accord exclusif « (cf. article du 21 janvier 2011) pour répondre ensemble à l’appel à projets. GDF Suez entend également entrer dans ce jeu très compétitif et sa filiale La Compagnie du Vent mène d’ailleurs depuis cinq ans un projet de parc très avancé en France, le parc des Deux Côtes au large du Tréport, lequel devra être remis en concurrence. Dans sa dernière version, le projet prévoyait d’installer 141 éoliennes de 5 MW à 14 km des côtes pour une mise en service en 2014. Là encore, le débat public de quatre mois, qui s’est achevé au Tréport et à Dieppe en septembre 2010 et dont on a pu suivre le déroulement sur ce blog, a permis de trouver, si ce n’est un accord parfait du moins des compromis acceptables entre la Compagnie du Vent et les pêcheurs, les élus locaux (même si certains continuent de réserver un accueil très défavorable au projet) et les associations de défenseurs du paysage.

Du côté du chantier nazairien STX France, on espère aussi se diversifier sur le segment des énergies marines renouvelables en se positionnant sur la réalisation de navires de pose d’éoliennes en mer, et sur la fabrication de structures métalliques. Un rapport « Energies marines renouvelables » remis à la Ministre de l’Ecologie le 18 janvier 2010 par Gisèle Gautier, sénatrice de Loire-Atlantique, fait état pour le seul éolien offshore  » d’un gisement de 150 000 emplois possibles à créer dans l’Union Européenne d’ici 2025. Les énergies marines constituent aujourd’hui un important gisement d’emplois en exploitation et en maintenance. Le secteur maritime est directement concerné à travers la construction navale, les ports et les services à la mer. » Le rapport souligne aussi que « des questions importantes de gouvernance, de choix de priorité, les concurrences entre les ports et les régions françaises, le problème des rivalités inter régionales, face à une concurrence européenne et mondiale déjà forte, sont des difficultés qui sont à traiter. Il s’agit d’une priorité si nous voulons voir l’essor de filières industrielles nationales des énergies marines, en faveur du développement économique et l’emploi. »

Concernant les conditions économiques de réalisation de ces projets l’Etat a d’ores et déjà fait savoir qu’il ne
fixera pas de tarif de rachat comme il l’a fait pour le photovoltaïque. Ce sont les opérateurs eux-mêmes qui devront proposer un juste montant du kilowatt/heure, compromis entre un seuil de rentabilité et un prix de rachat acceptable par EDF. Des experts européens estiment que le prix du kilowatt/heure devrait osciller non pas autour de 13cts comme il a été dit mais plutôt autour de 17 à 18 centimes, soit à commencer à devenir rentable après 10 années d’exploitation. Car quoi qu’il en soit et malgré toutes les interventions de l’Etat, il faut rappeler que ce ne sont pas les contribuables qui paieront l’éolien offshore mais les consommateurs d’électricité.

Le discours de Saint-Nazaire du Président de la République est consultable ICI

Docs : sites liés.Photos : 1. Carte des 5 sites Propices. 2. Eolienne offshore ©wpd offhore 3. Navire construit par STX

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