TORONTO – (Canada) – 27/10/2009 – 3B Conseils -Selon le journal The Star du 23/10/09 (ICI),le Ministère des Ressources naturelles de la province canadienne de l’Ontario aurait reçu plus de 100 demandes concernant quelques 500 projets d’implantation de parcs éoliens offshore pour la région des Grands Lacs. Presque en état de choc, à en croire The Star, le ministère a préféré temporairement cesser de recevoir les demandes jusqu’à ce qu’il puisse examiner le flux déjà reçu et s’assurer que les processus appropriés seront mis en place pour l’octroi des approbations. C’est ce que la ministre, Donna Cansfield, a tenu en tout cas à faire savoir à Toronto lors d’une conférence de presse donnée à l’occasion d’une manifestation internationale qui réunissait un parterre de développeurs d’éolien offshore et d’investisseurs venus d’Europe, des Etats-Unis et du Canada : « La fenêtre ouverte sur les propositions a été temporairement fermée », a-t-elle confirmé, « nous avons besoin de temps pour répondre à ce haut niveau d’intérêt ainsi que pour garantir que nous progresserons d’une manière durable et écologiquement responsable dans ce dossier ». Le processus sera suspendu jusqu’en mars 2010.
Il faut dire que cet incroyable succès n’est pas si incroyable que cela. En effet avec un tarif de rachat de l’électricité fixé pour toute électricité produite offshore à $Ca 19 cts du kilowatt/heure (soit €12 cts du kW/h), l’Ontario se retrouve en tête des tarifs les plus attrayants de tout le continent Nord Américain. Si l’on ajoute à cela que ce tarif de rachat a été garanti pour courir sur les 20 prochaines années, on a une idée de l’excellente affaire que ce tarif de 40 % plus avantageux que celui accordé au rachat de l’électricité d’origine éolienne onshore représente. L’autre explication de ce succès phénoménal tient aussi, bien entendu, à la configuration géographique des Grands Lacs Ontariens. Le potentiel de la ressource éolienne a été évalué en 2008 dans une étude d’Helimax Energy Inc. (« Consultants en énergie éolienne au service du monde ») à « 35 000 MW d’énergie soit 7000 éoliennes offshore installées sur les lacs ». C’est effectivement impressionnant, mais ce n’est qu’un potentiel. Pas de panique ce n’est pas la réalité ! Aucun parc éolien offshore commercial n’existe encore sur le territoire canadien pas plus qu’aux Etats-Unis d’ailleurs. Les Cassandre de l’éolien offshore rappelle à qui veut l’entendre que les éoliennes sur les Grands Lacs Ontariens vont avoir à affronter (côté américain comme côté canadien) des conditions climatiques inédites (eau douce gelée une grande partie de l’année) avec tous les problèmes de contraintes mécaniques que cela implique et les contraintes d’entretien. Eric Boysen, directeur de projets d’énergies renouvelables au Ministère des ressources naturelles, fait ainsi remarquer : « Le fait est, que personne n’a jamais construit d’éolienne offshore en eau douce jusqu’à présent et qu’il faut bien que quelqu’un fasse le premier pas ». Certes mais celui qui le fera risque d’avoir quelques surprises !
Des questions environnementales importantes subsistent aussi qui n’ont toujours pas été résolues. Mark Mattson, président du puissant groupe environnemental Lake Ontario Waterkeeper, bien que soutenant globalement l’idée d’un projet éolien pour la région, n’en surveille pas moins pour autant de très près les évolutions sur les lacs canadiens et américains. Cette ONG pense que le gouvernement canadien doit faire preuve de prudence en la matière et s’assurer que ces turbines massives ne perturbent pas les écosystèmes sensibles et ceci à la fois au-dessus et au-dessous de la surface des lacs. « Nous ne sommes pas de ceux qui pensent forcément que chaque projet est un bon projet » a déclaré Mattson qui est préoccupé aussi bien de l’ampleur des projets que du phénomène NIMBY qui pourrait naître chez les riverains en cas de maladresse et faire diminuer les approbations. S’assurer que les projets ne perturbent pas les voies de navigation (directes et traversières) sur les lacs, les parcours de migration des oiseaux et des poissons ne sera cependant pas suffisant. Dans le cas des projets des Grands Lacs, les développeurs auront également à remédier au manque d’infrastructures. Les barges et les grues nécessaires à l’installation de toutes ces turbines devront stationner dans des ports en eau douce suffisamment grands qui n’existent pas vraiment à l’heure actuelle sur le pourtour des lacs, même si Toronto paraît tout indiqué pour entamer cette transformation. « Il ne faut pas imaginer que la plupart des projets dont nous discutons aujourd’hui seront construits dans les 5 ou 10 prochaines années » a déclaré Bruce Bailey, président du conseil de l’agence de consultants éolien AWS Truewind LLC.
Malgré cela, ou à cause de cela peut être d’ailleurs, certains équipementiers éoliens parmi les plus prestigieux n’hésitent pas à s’installer sur place. C’est ainsi que jeudi 22 octobre dernier, le géant danois Vestas Wind Systems AS a annoncé qu’il venait d’ouvrir un bureau à Toronto qui sera le QG de son activité éolienne en Amérique du Nord. Je rappelle que Vestas est un des pionniers de l’installation d’éoliennes offshore puisque les premières qu’il ait installées l’ont été en Mer du Nord en… 1995 ! Questionné par The Star sur l’intérêt industriel que Vestas pouvait avoir en Ontario, Henrik Jensen, directeur des ventes de la compagnie, a répondu : « Nous allons mettre en place les installations là où nous avons de la demande pour les turbines ». Certains analystes font remarquer que si l’ambition de Vestas n’avait pas été les Grands Lacs, mais l’Amérique du Nord en général, la compagnie aurait parfaitement pu s’installer à Boston. Le choix de Toronto apparaît donc à certains comme une indication des futures intentions de la compagnie quant à sa présence en Ontario. Ce 26 octobre dernier toujours, le fournisseur d’électricité Toronto Hydro obtenait l’autorisation de placer un anémomètre dans le lac Ontario au large des falaises de Scarborough, où le service public a projeté de construire un parc éolien de 100 MW offshore.

Article : Francis ROUSSEAU

Docs : Sites liés. Photos : 1. Carte du Lac Ontario . 2. Turbines éoliennes offshore en mer du nord Vestas © Vestas


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