France – Jeudi 20/02/2020 – energiesdelamer.eu. La nouvelle note de l‘ISEMAR parue en février, traite des solutions innovantes à côté des solutions dites « conventionnelles » pour répondre à la règlementation IMO 2020.  Les objectifs de l’OMI visent à réduire le volume total des émissions de GES annuelles d’au moins 50% en 2050 par rapport à 2008 et l’intensité carbone de leur navire d’au moins 40% en 2030, par rapport à 2008 tout en poursuivant les efforts en vue d’atteindre 70% d’ici 2050. Plusieurs carburants sont envisagés, dont des biocarburants de 2ème et 3ème génération… et l’hydrogène. Les notes ne traitent pas de la propulsion vélique… mais se concentrent sur les carburants.

 

Dans le cadre du programme GoodShipping, CMA CGM et Ikea Transport & Logistics Services testent un nouveau biocarburant marin mis au point par la société néerlandaise GoodFuels, ce biocarburant de deuxième génération est fabriqué à partir de dérivés de résidus forestiers et d’huiles usagées (huiles de cuisson recyclées). Goodfuels a annoncé l’entrée en service en 2025 d’une nouvelle raffinerie à Rotterdam capable de fournir 300 000t/an. L’objectif est de passer à la phase d’industrialisation et d’ainsi diminuer le prix du nouveau carburant. CMA CGM aurait également passé un accord avec Shell pour être fournie avec un mélange de biocarburants dont 20% sont issus d’huile de cuisson usagée…

 

ExxonMobil, s’intéresse à un biocarburant dit de troisième génération1 à base d’algues, dont le rendement serait bien plus élevé que celui issu de l’huile de palme, de soja ou encore de maïs pour une même surface de production. L’autre avantage est que les algues n’entrent pas en concurrence avec des usages alimentaires (non soustraction de terres cultivables et non recours à la déforestation), pouvant perturber le cours mondial des denrées et engendrer des crises humanitaires.

 

Parmi les projets liés à l’hydrogène, 20 concernent le maritime

L’hydrogène (H2) ne représente que 55 Mt/an, principalement pour l’alimentation des industries chimiques et pétrolières, il existe très peu d’installations de liquéfaction.

 

L’UE compte environ 250 projets liés à l’hydrogène, en cours ou envisagés, parmi eux, 20 concernent le maritime. Des projets de ferries alimentés à l’hydrogène comprimé sont en cours en Californie, en Ecosse ainsi qu’en Norvège. Des engins de manutention de conteneurs sont aujourd’hui alimentés à l’hydrogène dans les ports de Valence et de Los Angeles. En France, la navette fluviale le Jules Verne 2 à Nantes et l’Energy Observer, un catamaran expérimental high-tech, l’utilisent.

 

L’hydrogène est trois fois plus énergétique que le pétrole, et servirait à la fois de combustible pour la propulsion du navire et d’électricité grâce à une pile à hydrogène. On ne le trouve pas naturellement seul, il est toujours associé à d’autres molécules, la plus répandue étant la molécule d’eau (H2O).

 

L’hydrogène ne permet pas pour l’instant, de répondre à l’ensemble des usages maritimes, notamment ceux des navires de forte puissance ou transocéaniques. On l’obtient en grande majorité par vaporeformage des hydrocarbures (extraction de gaz naturel sous l’action de la vapeur d’eau surchauffée). Ensuite, ce gaz hydrogène viendra alimenter une pile à combustible. Cette technique dégage énormément de CO2. Pour 1t de H2 produite, 10 à 11t de CO2 sont produites, et en général, émises dans l’atmosphère.

 

Actuellement, c’est le procédé le plus économique pour produire de l’hydrogène industriel. Son coût au Kg reste cependant le triple de celui du gaz naturel. Pour faire baisser les coûts, il faudrait des projets de plusieurs dizaines de MW dès la phase initiale. Cette technique est condamnée à plus ou moins courte échéance car trop émettrice de CO2 dans l’atmosphère. Mais d’autres techniques décarbonées de production d’hydrogène existent via l’électrolyse alcaline. Il n’en reste pas moins que les coûts de production sont aujourd’hui encore rédhibitoires (trois fois ceux du vaporeformage) et dépendants de l’électricité décarbonée. Un autre inconvénient est le stockage de l’hydrogène. Ce dernier doit être liquéfié à pression atmosphérique et à une température extrêmement basse (-253°C), or ceci représente un coût énergétique important. Une autre solution consiste à comprimer l’hydrogène à très haute pression (700 bars), tout en maîtrisant les risques de fuites, de corrosion et d’explosion. Cela nécessitera également de très gros réservoirs et exclura ainsi les petits navires.

 

Des projets de production d’hydrogène vert, via l’électrolyse de l’eau par des énergies renouvelables sont à l’étude. Toyota est en train d’implanter une centrale de production d’énergie renouvelable sur le port de Long Beach, en Californie. Prévue pour ouvrir en 2020, elle sera en mesure de générer chaque jour 2,35 MW d’électricité, ainsi qu’1,2 t d’hydrogène. La centrale pourra donc alimenter en carburant les véhicules transitant par le port. Toyota a également construit sur place une station hydrogène.

Le groupe pétrolier BP, Nouryon (entreprise de chimie) ainsi que le port de Rotterdam souhaitent convertir la raffinerie qui utilise actuellement de l’hydrogène dérivé d’hydrocarbures par de l’hydrogène vert, ce qui pourrait réduire les émissions de CO2 de 350 000t/an. L’accord prévoit une installation d’électrolyse de l’eau de 250 MW permettant de produire jusqu’à 45 000 t/an d’hydrogène vert. Ce serait le plus grand centre du genre en Europe. Pour une généralisation de l’hydrogène vert comme moyen de propulsion maritime, il faudrait créer un maillage de stations de ravitaillement ainsi que de nouveaux moyens de stockage. Comme energiesdelamer.eu l’a publié le 19 février, un projet émerge au Royaume-Uni autour du consortium d’ITM Power, Ørsted, Phillips 66 Limited et Element Energy.

 

Dans un rapport de décembre 2019, le SSI (Sustainable Shipping Initiative) a estimé, au travers de son enquête auprès de différents opérateurs portuaires, que les biocarburants pourraient couvrir entre 10 et 30% des besoins énergétiques du transport maritime 2 , mais ne semblent être qu’une solution de court terme dans le mix énergétique du transport maritime. Par rapport aux énergies fossiles utilisées actuellement dans le transport maritime, les biocarburants exploités de façon raisonnée sur le plan social, économique et environnemental réduisent de 80 à 90% leurs émissions de GES et ne rejettent pas d’oxydes de soufre. En dehors de quelques réglages, aucune modification importante du navire n’est nécessaire. Reste à convaincre les armateurs qui se souviennent que les biodiesels de première génération avaient provoqué des dysfonctionnements des moteurs et ainsi mis en péril la sécurité maritime.

 

1 – La première génération était réservée aux voitures, la deuxième est issue des résidus agricoles et forestiers et enfin la troisième génération avec les algues et les bactéries. Le bilan environnemental d’un biocarburant doit prendre en compte chaque étape de production de la culture à la fabrication et enfin à l’utilisation finale.

2 – The Role of Sustainable Biofuels in the Decarbonisation of Shipping The findings of an inquiry into the Sustainability and Availability of Biofuels for Shipping Report prepared by the Sustainable Shipping Initiative (SSI), 11 décembre 2019.

 

Points de repère

 

Lors du salon SITL qui se tient du 17 au 20 mars 2020, à l’occasion du Maritime Day le 19 mars, Pascal Gabet (HAROPA- Port de Rouen), Olivier Trétout (Grand Port Maritime de Nantes Saint-Nazaire), Hervé Martel (Grand Port Maritime de Marseille), Stéphane Raison (Grand Port Maritime de Dunkerque), Baptiste Maurand (Grand Port Maritime du Havre), Otto Schacht (Kuehne + Nagel) participent à la table ronde sur le transport maritime.

 

Pour prendre connaissance les notes citées de l’ISEMAR

Février 2020 : « Environnement : des solutions innovantes pour les navires de demain« 

Janvier 2020 : « Global Sulphur Cap 2020: Etat des lieux« . La flotte de commerce mondiale compte environ 60 000 navires de haute mer, elle consomme près de 4 M de barils de pétrole brut par jour (568 000 T de fioul lourd), soit 4% de la consommation mondiale totale et génère 2,5% des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES), soit 940 Mt de CO2 par an. 

Novembre 2018 : Les émissions du transport maritime: Questions économiques et technologiques

 

L’institut ISEMAR créé par les collectivités locales des Pays de laLoire, la CCI et la communauté portuaire de Nantes Saint-Nazaire, a développé une expertise d’analyse économique autour du transport maritime, les ports et l’industrie. Il publie mensuellement une Note de Synthèse et fournit ainsi  une information synthétique sur les enjeux liés aux changements de l’économie maritime.

 

19/02/2020 – energiesdelamer.eu. Hornsea 2, sera couplé à des électrolyseurs pour produire de l’hydrogène vert. Le projet Gigastack développé par ITM Power vient de recevoir une subvention de 7,5 M£ (9 M€) de la part du gouvernement britannique dans le cadre de son plan hydrogène dans le cadre du concours BEIS (Hydrogen Supply Department).

 

 

22/02/2018 – Réduire les pollutions du transport maritime : un défi clé dans la lutte contre le réchauffement climatique. Rapport de l’IRIS

 


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