LONDRES – (Royaume-Uni- U.E.) – 20/10/2010 –  Les coupes budgétaires sans précédents que s’apprête à annoncer en milieu de journée le Ministre britannique des Finances, George Osborne, (95 milliards d’euros doivent être économisés en 4 ans) ont déjà fait une première victime : le projet de barrage et d’usine marémotrice et hydrolienne sur l’estuaire de la Severn que le gouvernement britannique vient de décider d’abandonner purement et simplement. Beaucoup souhaite que ce soit la seule victime de ce plan de rigueur. Le plan d’austérité britannique annoncé aujourd’hui, un des plus sévères parmi les pays de l’Union Européenne, se traduira par des coupes de 25% en moyenne dans chaque ministère (y compris celui de l’Energie) qui pourraient être portés jusqu’à 40% en ce qui concerne le ministère de l’Environnement. Selon certaines études, l’austérité pourrait coûter un million d’emplois dans les secteurs public et privé, ce qui a poussé le Premier Ministre, David Cameron, à répéter qu’il n’avait pas le choix pour « sauver le pays de la faillite ». 40 % de coupe dans le budget de l’environnement et 25 % dans celui de l’Energie, signifieraient que l’Etat se désengagerait d’à peu près la moitié des projets dans lesquels il est engagé aujourd’hui ; certains experts voient mal comment ces « économies » peuvent être compatibles avec les objectifs de réduction de CO2 à réaliser d’ici 2020, et prédisent à certaines énergies renouvelables (pas toutes on le verra !) des jours difficiles. Mais rien n’est encore joué…
La première victime de ce plan est donc le projet sur la Severn. Telegraph.com s’exprimait déjà sur le sujet le 18/10/2010 en annonçant que le gouvernement étayait sa décision d’abandonner le projet en prenant appui sur une étude officielle qui dit « ne pas comprendre la nécessité stratégique qui devrait pousser le gouvernement à investir près de 24 milliards d’euros de fonds publics dans le gigantesque projet de la Severn ». Un rapport qui tombait à point nommé. Il faut se souvenir que si ce projet avait été réalisé (j’ai du mal à en parler au passé mais c’est un fait ! ), il aurait pu fournir 8,6 GW d’électricité renouvelable à partir d’un mix d’énergie marémotrice et d’énergie des courants – soit l’équivalent de 5% des besoins du Royaume-Uni et la production de deux ou trois centrales nucléaires. Cet abandon, rapproché de la décision de Vattenfall (cf. colonne dernières nouvelles du blog) de ne pas mettre en construction une extension de 300 MW à Thanet, le plus grand parc offshore actuellement en fonction dans le monde, sonne de façon assez négative pour les énergies marines renouvelables au Royaume-Uni, même si certains veulent tout de même continuer à y croire ! Ainsi concernant le projet abandonné de la Severn, beaucoup préfèrent que l’abandon soit dû à des raisons économiques plutôt qu’à des raisons écologiques (le projet était sujet à polémiques dans ce domaine). Des raisons économiques laissent une porte entr’ouverte sur une possible réactivation dans des temps meilleurs, alors que les raisons écologiques bouchent plus sérieusement l’horizon. Et justement puisqu’il est question d’écologie, la polémique fait déjà rage sur l’abandon du projet. Décidément ! En effet, en l’abandonnant, le ministère de l’énergie et du changement climatique n’ignore pas qu’il ouvre la voie à la possibilité d’implantation de nouvelles centrales nucléaires sur huit sites – Bradwell (Essex), Hartlepool et Heysham (Lancashire), Hinkley Point (Somerset), Oldbury (South Gloucestershire) Sellafield (Cumbria), Sizewell (Suffolk) et Wylfa (Anglesey). Le gouvernement de coalition a d’ailleurs déjà fait savoir qu’il donnera le feu vert aux entreprises qui voudront construire de nouvelles centrales nucléaires, bien qu’il n’existe pas de subventions publiques dans ce domaine.
Dans son édition du 17/10/2010, The Guardian, qui titre sur le « naufrage du projet de la Severn », se livre à une analyse plus fine de la décision gouvernementale. Il semble penser que le gouvernement aurait tranché en faveur de formes d’énergies renouvelables déjà « éprouvées » comme le nucléaire ou le photovoltaïque, pour avoir la faveur des investisseurs, plutôt que de prendre le risque de se lancer dans la mise en oeuvre d’un projet déjà sujet à de nombreuses contestations écologiques. Concernant le barrage de l’estuaire de la Severn, et malgré son aspect spectaculaire, il faut donc considérer que c’est la moins douloureuse des décisions que le gouvernement ait eu à prendre ! Il se pourrait évidemment que ce ne soit pas la dernière et il ne faudrait pas croire que le Royaume-Uni soit une exception dans les mesures drastiques d’austérité que la plupart des pays de l’Union Européenne sont en train de prendre les uns après les autres…
Pour l’heure, au Royaume-Uni, le grand bénéficiaire de ces économies à réaliser pourrait donc bien être… le nucléaire, énergie renouvelable bien connue !

Article : Francis ROUSSEAU

Docs Sites liés. Photos : l’estuaire de la Severn (U.K)

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